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21 mai 2024

Lucie Charest - lcharest@medialo.ca

Pas juste une question de profits

Carmen Lévesques

©Gracieuseté

Carmen Lévesques, est aux premières loges pour constater les inquiétudes de la communauté.

AFFAIRES – Le complexe de RYAM à Témiscaming regroupe 700 emplois. L’annonce de la suppression temporaire, voire définitive, de 275 d’entre eux, soit près de 40 % s’est abattue, telle une bombe, sur la petite communauté de moins de 2500 âmes le 30 avril. Des membres de la communauté d’affaires réagissent.

Vincent Labranche est copropriétaire d’un dépanneur station-service au cœur de Témiscaming. Il a aussi été très actif à titre de courtier immobilier. Il a accueilli la nouvelle avec des sentiments mitigés. 

« On vient à peine de sortir des répercussions du confinement de la COVID, a-t-il mis en contexte. Ça a eu des impacts sociaux et économiques qui sont encore présents. Ça a laissé des traces. Cette nouvelle, sans l’avoir totalement anticipée, c’est une nouvelle qui flotte toujours au-dessus de nos têtes. C’est une nouvelle que nous redoutons toujours quand nous vivons dans une ville mono-industrielle. Mais, Témiscaming est une communauté résiliente, une communauté qui se tient, face à ces événements hors de notre contrôle. » 

Activité immobilière et résidentielle 

Courtier immobilier depuis 2017, M. Labranche avait pris un pas de recul de cette profession depuis 18 mois. « Notre commerce au centre-ville à Amélie, ma conjointe, et à moi a perdu pas loin de 75 % de son chiffre d’affaires au début de la COVID. Même chose du côté immobilier, une pénurie d’offres a provoqué une compression vers le haut. Les prix ont monté très rapidement, ensuite, ça a été les taux d’intérêt qui ont ralenti le marché. » 

Pour M. Labranche, une nouvelle de fermeture comme celle d’aujourd’hui, plonge encore les gens dans l’incertitude. « Le temps que les choses se placent, on va voir des maisons mises en vente, a-t-il anticipé. Ceux qui seront dans l’obligation de vendre, ça va entraîner une compression vers le bas, car il y aura davantage d’offres et pas assez d’acheteurs. » 

Du côté de la construction et de la rénovation, la copropriétaire du Home Hardware, Centre de Rénovation FLD inc., Francine Desrochers, avait déjà constaté une baisse d’achalandage à l’époque de la grève chez Tembec il y a une dizaine d’années. 

« La journée même où le vote de grève a été pris, on a vu les ventes chuter d’un coup, a-t-elle relaté. Par contre, ça s’est replacé. Aujourd’hui, nous anticipons les répercussions de la fermeture avec moins d’inquiétudes. Peut-être que les gens feront moins de rénovations pour un bout, mais il y aura de nouvelles constructions. Une quinzaine de terrains viennent d’être rendus disponibles sur le bord du lac Kipawa. Il y aura de nouveaux chantiers. » 

« La journée de l’annonce, une de mes clientes qui vient régulièrement prendre son café ici a fondu en larmes en arrivant. Son fils venait de recevoir leur lettre de licenciement. Lui et sa conjointe venaient de s’acheter une maison, un bateau. Ils ne travaillaient à l’usine que depuis quatre ans. »  - Carmen Lévesques, copropriétaire de la Brassette Tem-Rose 

Inquiétude pour les jeunes familles 

Pour Vincent Labranche, la suppression de ces 275 emplois représente davantage une source d’anxiété pour les employés que pour la communauté d’affaires. « Nous avons la chance d’être une ville bilingue et multiculturelle à 40 minutes d’une ville ontarienne de 50 000 habitants, a-t-il fait remarquer. Des gens de l’autre côté de la frontière préfèrent venir s’installer chez nous, où ils peuvent payer leur maison 100 000 $ moins cher. Ils n’hésitent pas à faire la route pour aller travailler à North Bay, en sachant qu’ils seront très bien accueillis dans notre communauté. » 

Son de cloche pratiquement équivalent chez Carmen Lévesques, copropriétaire de la Brassette Tem-Rose. « Nous avons beaucoup de touristes qui viennent ici, a-t-elle noté à son tour. Mais ce n’est pas ça qui nous importe le plus. Ce sont les partys de bureau, ce sont les gens de l’usine qui viennent célébrer ici avec leur famille. C’est notre monde. Pendant la pandémie, ils nous ont encouragées, ils nous ont soutenues. Nous avons mis sur pied un service de livraison, sans eux, on n’aurait jamais passé au travers. » 

C’est justement cette proximité et cette solidarité avec la communauté qui deviennent les plus troublantes. Mme Lévesques est aux premières loges pour constater les impacts d’une telle nouvelle chez les gens. « La journée de l’annonce, une de mes clientes qui vient régulièrement prendre son café ici a fondu en larmes en arrivant, a-t-elle confié. Son fils venait de recevoir sa lettre de licenciement. Lui et sa conjointe venaient de s’acheter une maison, un bateau. Ils ne travaillaient à l’usine que depuis quatre ans. » 

Ce jeune couple n’est pas et ne sera pas un cas isolé à Témiscaming si la fermeture prévue en juillet devait se poursuivre. « Ici, nous avons un jeune couple qui avait acheté sa maison à 300 000 $ au plus fort du marché, a confirmé Vincent Labranche. Ils ont tous les deux perdu leur emploi. Ce n’est pas seulement un cauchemar, car un cauchemar, on se réveille et c’est fini. » 

Vincent Labranche

©Gracieuseté

Vincent Labranche est un homme d’affaires bien au fait de l’activité économique dans sa communauté.

Francine Desrochers

©Gracieuseté

Francine Desrochers est consciente qu’un ralentissement pourrait se produire, mais a confiance que de nouveaux projets pourraient se réaliser.

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